Les premiers psaumes de Marot mis en musique, les psaumes 137 et 130Les musiciens de France n'attendirent pas que des mélodies soient proposées pour les psaumes par les Psautiers (processus abordé partiellement en 1539,1542 et 1543), mais ils prirent le texte comme base de compositions originales sous forme de motets. Même après la popularisation des mélodies proposées dans les psautiers genevois, les compositeurs continuèrent à appliquer cette technique de composition aux psaumes marotiques, en mettant en musique l'intégralité du texte de chaque psaume sans faire référence aux mélodies habituelles. Le premier psaume de Marot à attirer l'attention d'un compositeur fut le Ps. 137 :Estans assis aux rives acquatiques / de Babylon plourions melancoliques... Un certain Abel, inconnu par ailleurs, écrivit une musique polyphonique du texte intégral en trois parties (pour les cinq strophes), publiée à Lyon en 1540. La deuxième mise en musique d'une versification de Marot concerna le Ps. 130 : Du fons de ma pensée, au fond de mes ennuys.. . Il s'agit du célèbre psaume de la pénitence Deprofundis clamavi... Benedictus Appenzeller, compositeur à la cour de Marie de Hongrie, régente des Pays-Bas, fit publier sa musique en 1542, à Anvers; il fut suivi dans son choix par une pléthore de compositeurs, dont les premiers furent Gentian (Lyon, 1544) et Pierre de Manchicourt (1545, Tournai, mais publié à Anvers). Dans les deux psaumes le texte n'est pas identique à celui d'E. Raffet, publié en 1541. Les compositeurs ont peut être utilisé une version manuscrite, ou bien l'une des éditions clandestines parues avant l'édition officielle, peut-être celle d'Antoine Des Gois, (Anvers, 1541). Il faut reconnaître que les musiciens se souciaient médiocrement de la fidélité aux textes. Ainsi, en 1560 Roland de Lassus utilisa encore le texte « imparfait »du Ps. 130. Il existe peut-être d'autres mélodies, notammentsous forme de manuscrits ; mais la récolte est déjà impressionnante, étant donné que trois des quatre compositeurs que nous venons de citer - Appenzeller, Gentian et Manchicourt - furent fort célèbres à l'époque 1. 1540 : Abel (on ignore si c'est son véritable nom ou un pseudonyme): Ps. 137 : « Estans assis » 2. 1542: Benedictus Appenzeller : Ps 130 : « Du fons de ma pensée » 3. 1544: Gentian : Ps 130 : « Du fons de ma pensée » 4. 1545 : Pierre de Manchicourt : Ps 130 :« Du fond de ma pensée » Enregistrement [ici]A l'occasion de la 14e C.A. Mayer Memorial Lecture réunie à Londres, le 11 novembre 2011, Dick Wursten a organisé un enregistrement de la première mise en musique d'un psaume de Clément Marot, le Ps. 137.Willem Ceuleers a réalisé une transcription basée sur l 'unicum de la British Library (un seul volume, les quatre voix sur deux pages en face l'une de l'autre, dont deux voix à l'envers). Six membres du Antwerps Collegium Musicum ont joué et chanté la musique, qui a été enregistrée. C'est une musique à chanter ès maisons ou, selon l'expression allemande, « über dem Tisch ». Les parties se laissent chanter, ou jouer sur un instrument, selon les disponibilités. Dans cet enregistrement on entend deux voix (soprano et baryton) et un quatuor de violes de gambe. La musique (partiellement reconstituée, le bassus n'a pas survécu) du Ps 130, de Gentian, a été enregistrée lors de la même session. Les deux compositions divisent leur texte en trois parties, dont la seconde est à trois voix. Daniëlle Van de Vloet : soprano Luk Verlackt : baryton Enregistrées au « Vrieselhof » Schilde (Belgique), par Raoul van Castel, le 23 octobre 2011, ces pièces de musique sont reproduites ici avec l'autorisation des ayants droit,quenous tenonsà remercier. Texte écrit par Dick Wursten et traduit par J.F. Gilmont. |